Marcel Delmotte
(Charleroi 1901 - 1984)
Étude pour le Prométhée
Crayon, fusain et crayon de couleur sur papier
Signature et date au milieu en bas : M Delmotte – 1932
Titre au milieu en bas : Étude pour le Prométhée
Titre au milieu en bas : Étude pour le Prométhée
1932
1160 x 680 mm
Biographie
« Si nous restons en permanente communion avec la nature, toujours elle nous répondra, car elle seule a le pouvoir magique de nous révéler à nous-même et à nous orienter vers la route de notre destin. »
Né le 24 avril 1901 dans une petite maison du quartier nord de Charleroi, Marcel Delmotte est un peintre, aquarelliste, dessinateur et sculpteur belge. Fils d’Aline Mascaux, ménagère, et d’Arthur Delmotte, ouvrier verrier, il grandit à l’écart de toute influence artistique. Dès l’âge de 12 ans, Marcel fait preuve de dons exceptionnels pour le dessin. D’instinct, le jeune garçon se nourrit aux sources de la peinture classique, y puisant une technique sûre, en même temps que l’extrême vigueur de la composition, de l’éclairage et de l’agencement des couleurs. Pendant la Première Guerre mondiale, il fréquente l'atelier libre de l'Université du Travail à Charleroi dirigé par le peintre Léon Van den Houten. Les cours comportent deux spécialités : un cours d’après l’antique et un cours d’après nature. L’enseignement est strictement traditionnel, centré sur l’étude des perspectives et de l’anatomie humaine et animale. Il y étudie les « structures naturelles ». Dans son temps libre, Delmotte croque naturellement des compagnons de travail, brèves esquisses d’une vie intérieure, silhouettes penchées sur la peine quotidienne, une grand-mère cousant près de la fenêtre, etc. Le trait est dégagé, appuyé, épuré. Le lavis ou le frottis lui donnent une consistance un peu trouble, à la manière d’images filmées au ralenti et qui semblent laisser une trainée impalpable. Le soucis du relief est habilement présent dans ses dessins grâce à de subtils dégradés. Cette technique est l’une des plus fertiles que Delmotte poursuit au cours de sa carrière. Dès son plus jeune âge, Delmotte est fasciné par la réalité. Son œuvre est essentiellement réaliste jusqu’en 1927 environ.
Au sortir de la guerre, il devient peintre en bâtiment et décorateur sous la direction de divers patrons. C’est ce métier de peintre-décorateur spécialisé dans les bois et les marbres qui lui font découvrir la peinture proprement dite. Sa pratique des métiers du bâtiment lui procure une connaissance profonde des matériaux. En 1922, il fonde sa propre entreprise qu’il abandonne plus tard en 1939. Entretemps, il retourne à l’atelier libre et expose ses première toiles en 1930. Trois ans plus tard, il expose pour la première fois au Salon des Artistes Français à Paris. Dans sa pratique artistique, il renonce au réalisme et s’oriente vers une forme de néo-classicisme ou de néo-humanisme, basée sur la recherche des compositions et des nombres. Le néo-classicisme de Marcel Delmotte ne s’inscrit pas dans la ligne académique des peintres néo-classiques du 19e siècle. Sa recherche personnelle procède davantage d’un état d’esprit que d’un style, d’une philosophie que d’une technique picturale. Ses maîtres sont Sandro Botticelli, Piero della Francesca et, surtout, Paolo Uccello. Ces influences se retrouvent notamment dans la forme des visages et des mains qu’il peints durant cette période. Entre 1927 et 1939, il étudie la Section d’or en effectuant de très nombreux relevés sur des éléments de la nature et sur des œuvres d’art. Vers les années 1931-32, il songe à mettre en pratique son expérience technique des bois et des marbres. Il découvre l’importance des masses, des « taches » et des glacis dans la composition d’un tableau. En 1936, il perd sa mère alors âgée de 66 ans. L’épreuve lui est difficile à vivre car il lui voue une immense tendresse. Quelques années plus tard, il obtient la décoration de l’Ordre de Léopold II. En 1940 , il expose au Musée de Mons, entre Pierre Paulus et Louis Buisseret, et reçoit les félicitations de Jean Delville, le patriarche de la peinture belge. L’artiste expose dans des galeries de Charleroi et Bruxelles à de nombreuses reprises. En 1952, il participe également au salon d'Art libre à Paris. Après la mort de son père en 1953, Delmotte se rend à Vence et découvre les paysages de montagnes qui l’inspirent. En 1958, il reçoit le Prix Dupierreux à la suite d’une exposition. En 1961, il rentre à la galerie Isy Brachot. C’est l’année suivante qu’il épouse son élève Madeleine Deckers, née à Chatelet en 1914. En 1964, le casino de Spa organise une rétrospective de son œuvre.
Désormais en possession des bases fondamentales de son métier, il peut ouvrir les vannes à son inspiration personnelle. Il entame sa grande période « fantastique » en 1948 qui régira son œuvre jusqu’à la fin. Marcel Delmotte ne fréquente pas les milieux artistiques dont il vit en parallèle. Il n’a pas de contact avec les artistes de son temps. Il n’appartient à aucun mouvement. Delmotte visite les musées, les expositions, en quête de renseignements comme on parcourt les colonnes de fait-divers d’un journal local. Les seules lois valables sont celles que l’on découvre et non celles que la mémoire peut apprendre. Pour lui, la mémoire est l’ennemie de la création : « Perdre la mémoire est un privilège que nous donne la nature, cela nous permet de ne retenir que ce qui est nécessaire à l’alimentation de notre vie intérieure. » Peintre de figures, Delmotte fait naitre de son crayon ces corps souvent qualifiés de marmoréens, qui ont l’apparence du marbre (blancheur, éclat, froideur). Ils ne sont de toute évidence pas en marbre au vu des poses alanguies et du mouvement des corps. Il aborde tous les genres, mais excelle dans les paysages visionnaires et les grandes fresques symboliques. Tout au long de son cheminement, son principal message reste le souci de l'évolution de l'humanité. Son idéologie est inspirée de la mythologie, de la Bible et de la Divine Comédie. Delmotte développe une période réaliste et néo-classique où sa peinture prend toute son ampleur. Ses premières œuvres sont une interrogation sur le destin de l'homme. Le style élégant et raffiné fait référence au classicisme. Il accorde l'importance au volume et nuance avec subtilité la gamme chromatique. Le style n'est pas sans rappeler Giorgio De Chirico dont la connaissance de l'œuvre fut décisive pour Delmotte. Peintre réaliste à ses débuts, il est influencé par l'expressionnisme et évolue vers une esthétique d'esprit surréaliste avec de grandes compositions, des paysages lunaires et des architectures futuristes. Dans sa peinture d'après-guerre, on retrouve son idéal humaniste, traité cette fois sur un fond informel, travaillé au couteau, et duquel se détachent les scènes chaotiques que lui inspire son imaginaire. Il écrit : « L’art est un miroir qui nous révèle le visage de l’insondable invisible. Il guide nos pas sur la route inconnue qui conduit à la conquête de l’inaccessible. » Il poursuit sa réflexion en trouvant une formule qui marque son inspiration de façon colorée : « Le progrès est un rhinocéros… L’humanité, une tortue… La société, un rapace… C’est du chaos en ébullition que naissent les idées nouvelles. » Ce chaos créateur explique pourquoi l’imaginaire de Marcel Delmotte s’attache à un nombre infini de thèmes. Son œuvre touffue, visionnaire, bien qu’homogène en dépit de facture parfois fort différentes, est souvent imprégnée de l’esprit classique le plus étendu, de l’Antiquité à la Renaissance. Son œuvre n’a pas de parallèle, ni chez les symbolistes, ni chez les surréalistes, ni chez les peintres de la Renaissance italienne. Sans doute voulait-il affirmer sa volonté d’opérer une synthèse de courants qui embrassent pratiquement toute l’histoire de l’art.
En 1969, Delmotte présente une exposition importante : L’Humanité en marche. En 1971, une grande rétrospective de son œuvre prend place au Palais des Beaux-Arts de Charleroi (132 œuvres de 1931 à 1971). L’exposition met en avant l’itinéraire exemplaire de cet enfant du Pays Noir. En 1976, la galerie Isy Brachot organise elle aussi une rétrospective de son œuvre. Marcel Delmotte s’éteint le 8 novembre 1984 à Mont-sur-Marchienne en Belgique, il est alors âgé de 83 ans.
Références bibliographiques
Dendenlot, C. & Dufrane, P., 1992. Les dessins de Delmotte. Mecenart Books.