Amédée Lynen
(Saint-Josse-ten-Noode 1852 - Bruxelles 1938)
Éclaircie
Aquarelle, crayon et fusain sur papier
Signature et date en bas vers la gauche : Am. Lynen 1922
1922
398 x 557 mm
Œuvres
Biographie
J’ose dire que je suis content de ce que je fais ; mon art m’amuse, il est peut-être feuilletonesque, cela m’est égal.
Peintre, graveur, dessinateur, illustrateur et aquarelliste belge, Amédée-Ernest Lynen nait le 30 juin 1852 à Saint-Josse-ten-Noode. Très jeune, ses parents Lisa Gilson et Arnold Lynen disparaissent. Son père était correcteur à l’Émancipation, professeur de grec et de hollandais, chroniqueur théâtral au Vert-Vert. Amédée, ses deux frères et sa sœur se mettent alors à travailler pour subvenir à leurs besoins. Il est tour à tour apprenti-typographe, graveur sur pierre, peintre d’enseignes, décorateur de bâtiments, et depuis 1880, illustrateur, aquarelliste et affichiste. A cette époque, il n’a pas suffisamment d’argent pour payer les trois cent francs pour suivre sa vocation de mariniste. Il suit alors des cours à l'Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles chez Paul Lauters et Joseph Stallaert. En 1880, il co-fonde le cercle L'Essor. Il devient également membre du groupe Pour l'Art et de la Société Royale Belge des Aquarellistes. L’œuvre de Lynen est pleine de pittoresque, de verve et d’humour. Dans son travail, il marque sa préférence pour les petits coins bruxellois pleins de charme et qui amusent par leur aspect original et populaire, en particulier les Marolles. Il représente ainsi la vie quotidienne à Bruxelles du début du 20e siècle en incarnant joyeusement son terroir dans ses qualités foncières. Il peint des tableaux de genre, mais il est surtout actif comme graveur et illustrateur. Il a pour le livre une prédilection marquée.
« Un petit homme, grisonnant, rondelet. De petits yeux malicieux luisent dans sa figure de bon vivant, au teint vif. Un nez imposant surplombe une moustache menue, énergiquement brossée, sous laquelle les lèvres masquent à demi un pli narquois de bonhomie souriante. On le trouve généralement derrière une pipe. Signe caractéristique : un éternel melon légèrement incliné sur l’oreille droite. Pour rétablir l’équilibre : une canne dans la main gauche. Brochant sur le tout la rosette d’officier de l’Ordre de Léopold. Démarche assurée et ferme ponctuée de quelques gestes nets du bâton, sentant le prévôt d’armes. »
Avec de petits coups de pinceau fins, il dessine des tableaux anecdotiques avec une exactitude extrême. Il trouve dans l’imagination attentive et attendrie le trait qui porte, le geste qui évoque et la couleur qui convient. Ses illustrations de livres sont souvent de petits croquis au crayon ou à la plume dans le texte, parfois rehaussés à l’aquarelle. Il illustre, entre autres, La Légende d’Uylenspiegel de Charles de Coster, Les Flamandes, Les Vertus bourgeoises. Amédée Lynen crée aussi des affiches et des programmes pour des revues, des théâtres de marionnettes, des théâtres d’ombre et des opérettes. En 1892, Le Diable au Corps paraît à Bruxelles. C'est le successeur du magazine Le Diablotin, organe des mécontents. Le magazine comprend des critiques de représentations théâtrales et de pièces satiriques. Les collaborateurs sont Charles Vos, Théo Hannon et Amédée Lynen. L'adresse éditoriale est initialement rue de la Pacification 31. En 1894, elle devient rue aux Choux 12. A cette dernière adresse, Charles Vos et Amedée Lynen ouvrent un cabaret du même nom où ils donnent libre cours à leur fantaisie en mettant en scène des spectacles d'ombres chinoises et des chansonniers. Le Diable au Corps existera jusqu'en 1929. Parmi les visiteurs figurent Théo Fleischman, René Lyr, Paul Vanderborght, James Ensor, Roger Avermaete, Michel de Ghelderode, Marie Gevers et Franz Hellens.
« Il ne se passe pas un jour sans que Lynen ne travaille, et il ne pourrait faire autrement tant son cerveau fourmille d'images de tous genres qu'il éprouve le besoin et le plaisir de traduire. Et suivant son humeur vous lui verrez en main le crayon, la plume ou les pinceaux. Sa technique, qu'il alterne constamment, ne pourrait justifier une classification aisée de ses œuvres, car dans chacun des dessins, illustrations et tableaux, nous retrouverons des paysages, des marines, des scènes de genre. Et avec quelle conscience il travaille ! Il faut voir ses carnets de croquis, il faut feuilleter ses cartons d'études. Le moindre accessoire qu'il met en œuvre a été pris sur le vif. Que de centaines de dessins, dont chacun par son rendu et son fini constitue une œuvre complète, ont précédé ces grands paysages qu'il affectionne, qu'il n'a vu tels que si vous les disséquez, si vous en détachez chaque partie, mais qu'il se compose à lui- même, corrigeant la nature en la complétant ! Et ce sont alors, avec un mouvement, une allure, un ensemble romantiques, des amoncellements de rocs, des bouquets d'arbres s'étageant au flanc des coteaux, des jeux gigantesques de nuages. Et ces dizaines d'études de marines, et ces centaines de dessins de paysages, passent encore au décuple quand il s'agit de croquer des types, de silhouetter des passants, de camper des bonshommes dans ses scènes de genre. C'est en effet par milliers qu'il a saisi, de quelques coups de son crayon précis et subtil, les allures, les gestes, la dégaine, des personnages d'hier ou d'aujourd'hui qu'il met en scène dans ces décors moyenâgeux, ces pignons à redans de style "espagnol", ces tourelles, ces ruelles, ces placettes du bon vieux temps. C'est dans ces compositions surtout qu'il affirme son vrai caractère. Dans l'opulence et le relief du décor, dignes des enlumineurs qu'il rêvait de faire revivre, avec le piquant et le naturel des attitudes, le pittoresque du détail qui l'avèrent dessinateur prodigieux, il donne libre cours à la plus inénarrable fantaisie, à l'exubérance et à la jovialité de l'imagination la plus débridée. »
Raoul Ruttiens
« Êtres et lieux, vous savez tirer votre art des milieux où vous vivez, ce qui est une force ; et vous ne vous occupez pas d’appartenir à une « école », ce qui est une sagesse. »
Félicien Rops
En 1930, une rétrospective de son œuvre est organisée par le Cercle Artistique et Littéraire au Vauxhall de Bruxelles. Le 28 décembre 1938, Amédée Lynen s’éteint à l’âge de 86 ans à Bruxelles. La commune de Saint-Josse-ten-Noode l’a mis à l’honneur en nommant une rue à son nom : la rue Amédée Lynen.
Références bibliographiques
Piron, P., 2003. Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècle. Ohain : Art in Belgium.
Roberts-Jones, P., 1995. Le dictionnaire des peintres belges du XIVe siècle à nos jours. Bruxelles : La Renaissance du Livre.
Ruttiens, R., 1923. Savoir et beauté, Revue interprovinciale d’art et d’enseignement. Troisième année – N°2 – Février 1923. Bruxelles : Comité interprovincial de Patronage. p.98-107.