Gabrielle Montald (née Gabrielle Canivet)
(Bruxelles 1867 - 1942)
Oiseau de paradis
Or au pinceau, graphite et rehaut d’encre de Chine sur papier
Signature en bas à droite : G. Montald 29
1929
580 x 435 mm
Biographie
Gabrielle-Élisabeth-Joséphine Canivet est une artiste belge née le 17 décembre 1867 à Etterbeek. Elle passe toute sa jeunesse à Gand. Elle est la fille d'un receveur-directeur des douanes et est entourée de ses deux sœurs : Louise et Hélène. Très rapidement, les trois sœurs Canivet, qui ne se quittent pas, sont mêlées à la vie artistique de cette ville. C'est sans doute dans les cercles artistiques et les réceptions mondaines que Gabrielle croise le chemin du jeune peintre monumentaliste Constant Montald, qu'elle épouse à Gand le 9 août 1892. Peu d’éléments existent sur ses origines ou sa pratique artistique avant son mariage. C’est certainement au côté de son père, exposant au salon de Bruxelles de 1883, puis de son époux qu’elle apprend à manier le crayon. Autodidacte aussi, elle développe un savoir dans les arts appliqués au travers de peintures sur soies aux motifs décoratifs. Gabrielle décore des robes et corsages tantôt de soie peinte tantôt de dorures sur taffetas noir, mais aussi des pièces de vaisselle en porcelaine.
« Je n'ai jamais appris à dessiner. Je me suis découvert ce don par paresse et coquetterie. C'était à l'époque où l'on cousait de la soutache sur les cols et les parements. Je trouvais ce travail long et désagréable. J'ai pris un pinceau et de la couleur à la colle. Au lieu de coudre, j'ai peint. Cette peinture ne tenant pas, je me suis mise à chercher un autre produit. Le crayon a suivi mon imagination. Je suis arrivée à composer les motifs directement sur la soie et à les peindre au moyen d'un procédé qui m'appartient ».
C'est en 1897 que le couple s'installe à Bruxelles, au 16 de l'avenue de la Renaissance à Etterbeek, chez la tante de Gabrielle. Très vite, Gabrielle entre en complicité avec Marthe Verhaeren, l'épouse d'Émile Verhaeren, avec qui Constant Montald est très lié. Constant Montald a emprunté les chemins d’une carrière professionnelle accomplie et réussie pour l’époque. Son parcours est jalonné d’événements significatifs : Prix de Rome, expositions, commandes officielles et professorat à l’Académie de Bruxelles. Ses activités contribuent non seulement à lui donner une large reconnaissance, mais aussi à développer le rayonnement artistique de son épouse.
Il faut attendre 1906 pour découvrir les premières œuvres de Gabrielle Canivet, dans le cadre de l'exposition universelle de Milan, où Montald présente La Lutte humaine pour laquelle il reçoit une médaille d'or. Quant à Gabrielle, elle y présente, dans la section consacrée aux arts féminins, trois boléros peints, quatre vêtements, trois écharpes, cinq reliures, quatre bourses dont une en perles et diverses étoffes. Elle y obtient un Grand Prix. L'année suivante, Gabrielle confirme son talent à la 5e exposition internationale d'art de Barcelone et remporte une première médaille ; le musée des Arts décoratifs de la ville lui achète même toute sa production d'étoffes ! Gabrielle est installée depuis peu dans la nouvelle demeure du couple, dans la vallée de la Woluwe. Entourée de jolis meubles chinois qui décorent le salon, elle y dispose d'un petit atelier dans les mansardes. Dès cette époque, Gabrielle décore déjà des éventails et remporte le prix de la comtesse de Flandre au concours d'éventails organisé par la Société des Arts de la femme en 1909. La même année, elle confectionne une couverture en soie peinte pour le manuscrit de Philippe II qu'Émile Verhaeren souhaite offrir à Maria Van Rysselberghe. Gabrielle Canivet exécute toute une série de reliures de soies peintes collées sur carton, dont certaines sont offertes aux Verhaeren. Ces reliures sont d'une facture presque abstraite, et semblent se faire l'écho d'un monde du silence issu de fonds aquatiques envahis d'une flore marine. Nénuphars stylisés, coraux bruns, œil de paon sur fond violacé ou turquoise étalent leurs courbes aux couleurs très chatoyantes. Champignons, oiseaux, poissons, mondes marins y étaient déjà des thèmes de prédilection. D'autres reliures sur soies peintes sont exécutées par ses soins pour des œuvres de Maeterlinck, comme La Vie des abeilles. En 1912, on la voit au Salon de La Libre Esthétique exposer des batiks de soie. C'est principalement pendant la Première Guerre mondiale qu'elle entame ses séries de poissons, de champignons et d'oiseaux décoratifs sur soie avec un procédé dont elle a le secret et qui garde à l'étoffe toute sa souplesse. Il lui arrive aussi d'utiliser la gouache blanche, noire ou rouge sur des fonds or. Ses compositions sont souvent habitées de fleurs exotiques et d'un escargot, qui fait peut-être office de signature. Elle campe ses oiseaux entourés de fleurs en utilisant la gouache et l'or sur fond noir ou le simple crayon sur papier de chine. Ses séries animalières se poursuivent jusqu'à la fin de sa vie.
« Les soieries devenant de mauvaise qualité, je me suis mise à dessiner sur papier les motifs que je croyais reproduire plus tard. »
Pour l'exposition des Arts décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925, Gabrielle reçoit encore une médaille d'argent pour une série de dessins décoratifs. En 1929, s'ouvre au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles une exposition du couple Montald où Gabrielle expose à nouveau une vingtaine de dessins décoratifs ayant toujours pour thème des oiseaux et des poissons, mais également des étoffes peintes et des projets d'illustrations. Son travail est salué lorsqu’il est mentionné par la critique dans un article du Soir du 20 novembre 1929 : « L’idéalisme, nous le retrouvons encore ici dans les travaux de Mme Gabrielle Montald, dont les interprétations de flore marine, noir et or, révèlent, mais avec une entente moderne du dessin et de la composition, une parenté étroite avec les enlumineurs persans et les peintres de laque japonais. Il faudrait s’arrêter devant chacun de ces merveilleux panneaux décoratifs d’une riche invention et d’un goût parfait ». Ce sont encore cinq dessins d'oiseaux décoratifs qui sont présentés au Salon de Printemps au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles du 14 avril au 6 mai 1934. Le 11 février 1942, à la suite d'un cancer du sein, Gabrielle Canivet s’éteint à l’âge de 74 ans. De 1940 à son décès elle entretient une abondante correspondance avec un admirateur d'Émile Verhaeren, René Vandevoir, à qui elle confie beaucoup de souvenirs de son passé.
Références bibliographiques
Caspers, B., 2016. Femmes artistes et femmes d’artistes : De l’exposition à la mise en scène. Le cas de Juliette Trullemans et Gabrielle Canivet. Koregos [Revue et encyclopédie multimédia des arts], le 25 février. Disponible à : https://koregos.org/fr/barbara-caspers-femmes-artistes-et-femmes-d-artistes-de-l-exposition-a-la-mise-en-scene/9715/#chapitre_9736.
Schoonbroodts, B., 2008. Artistes belges de l'Art nouveau: 1890-1914. Bruxelles : Éditions Racine.
de Sadeleer, P., 1994. L’ymagier, un centenaire fin de siècle et l’entre-deux-guerres (troisième partie). Catalogue de Vente publique du lundi 6 juin 1994.