Jef Lambeaux
(Anvers 1852 - Bruxelles 1908)
Les passions humaines (fragment)
Plâtre
Signature sur la face en bas à droite : Jef Lambeaux.
Circa 1890-94
44,5 x 60 x 12 cm
Biographie
Joseph Marie Thomas, dit Jef, Lambeaux est un sculpteur belge né dans une famille ouvrière d'un père d'origine wallonne et d'une mère flamande le 14 janvier 1852 à Anvers. Il est le fils de Marie Louise Loneu et de Thomas Antoine Lambeaux, chaudronnier et batteur de cuivre. Il grandit dans une famille d'artistes talentueux. Son sens artistique est vite repéré, et le jeune homme a l’opportunité d’entrer à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers pour étudier la sculpture sous la direction du sculpteur Joseph Geefs et du peintre Nicaise De Keyser. En 1871, sa toute première œuvre, intitulée Guerre, est exposée à l’exposition annuelle de l’académie. S'ensuit une longue série de groupes humoristiques et pittoresques, tels que Enfants qui dansent, Le nombre porte-bonheur et Un accident (1875). A cette époque, son principal souci est de représenter le mouvement. En 1877, il obtient la commande pour le monument funéraire de Jacob Jordaens à Putte, et pour 4 figures allégoriques sur les consoles de la colonne monumentale du Paardenmarkt à Anvers.
Il décide de suivre son ami et peintre Yan Van Beers à Paris, où il s'aventure dans la peinture et travaille dans l'atelier de Gustave Vanaise. Il y mène une vie modeste. En 1881, il revient dans son pays natal avec une nouvelle technique, la méthode de la cire perdue, qu'il utilisera pendant plusieurs mois au Musée Continental de Bruxelles. Grâce à l'argent récolté, il a pu créer sa première œuvre qui fera sensation, Le Baiser. Il s'installe à Saint-Gilles, où le succès l'attend. Il sculpte des cariatides pour l'Hôtel de ville d'Anvers et il expose Le Baiser et Les Lutteurs au Salon de Bruxelles, pour lesquels il obtient une médaille d'or. Son atelier regorge de bustes, de statues, d'études et de statues en plâtre. Lors d'une visite en Italie, il est très impressionné par les sculptures de Giambologna. C'est de là que vient sa préférence pour les effets de force et de mouvement dans la figure humaine. En 1883, il devient l'un des membres fondateurs du Groupe des Vingt, un cercle d’artistes avant-gardistes qui compte quelques grands noms : James Ensor, Fernand Khnopff, Félicien Rops, Henry Van de Velde, Anna Boch, Auguste Rodin, etc. Jef Lambeaux démissionne après la première exposition du cercle en raison de son mécontentement face aux idées trop avant-gardistes du groupe. Les thèmes qu’il travaille sont plutôt issus du folklore, de l’histoire ou de la mythologie. C’est le cas, par exemple, de la fameuse Fontaine de Brabo, inaugurée en 1887 sur la Grand-Place d’Anvers. Elle est le symbole officiel d’Anvers car elle retrace la légende fondatrice de la ville. Le sujet de la composition fait référence à l'histoire du soldat romain Silvius Brabo et du géant Druon Antigoon. Selon la légende, ce dernier demandait un important péage à tous ceux qui voulaient remonter le cours de l'Escaut. Les récalcitrants voyaient leurs mains tranchées par le géant. Il rencontra un jour Brabo, qui aurait réussi à le tuer et, pour venger les victimes, coupa la main du géant et la jeta dans le fleuve. Le socle montre des sirènes, des phoques et d'autres créatures marines, représentés avec une fluidité qui anticipe déjà l'Art nouveau. Jef Lambeaux est alors fait chevalier de l'Ordre de Léopold. Les commandes vont alors s’enchaîner. Il expose dans les salons à Bruxelles, à Berlin et à Paris. Il enchaîne les récompenses. Ses bronzes de petites tailles décorent de nombreuses demeures bourgeoises. Pourtant, Lambeaux est loin de faire l’unanimité. Son Ivresse, présentée au Salon de Bruxelles en 1893, lui vaut de nombreuses critiques pour sa représentation sensuelle de la chair humaine. Mais l'année suivante, après une exposition à Paris, il reçoit une décoration de la Légion d'honneur. En 1896, il reçoit la médaille d'or lors de la Grande exposition d'art de Berlin. Le 9 décembre 1898, Jef Lambeaux épouse Juliette Marie Christine Wittocx à Vilvorde. Leur fils, Émile, nait le 16 octobre 1875.
Durant l'Exposition Coloniale à Paris en 1900, Lambeaux reçoit le prix d'honneur pour son œuvre Le Triomphe de la femme. En 1903, il devient membre de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts. Il réalise également un grand nombre de portraits en buste, comme ceux d'Hendrik Conscience, d'Henri de Braekeleer et de Charles Buls, bourgmestre de Bruxelles. En matière de sculpture à la fin du 19e et au début du 20e siècle, il est impossible de ne pas comparer Jef Lambeaux avec la référence en la matière : Auguste Rodin. Les deux hommes se connaissent, et tous deux s’inspirent l’un de l’autre. L’expressivité des sujets et le travail des corps dénudés en mouvement sont autant de points communs de leurs œuvres respectives, signe d’une incontestable modernité. Un trait commun caractérise les deux hommes : le goût pour le sulfureux. Lambeaux semble s’amuser à choquer la morale de son époque. Franc-maçon notoire, il n’hésite pas à provoquer les esprits conservateurs. Lorsque la ville de Liège lui achète Le faune mordu pour l’installer dans le parc de la Boverie, la polémique éclate. L’œuvre, admirée par Rodin, représente une femme nue tentant de se défendre avec rage de l’agression sexuelle d’un faune en lui mordant l’oreille. Le sujet choque tellement que le vicaire de Liège fait renvoyer l’œuvre à son auteur. Avant même l’affaire du faune, une œuvre emblématique de Lambeaux attise les polémiques : Le pavillon des Passions humaines, inauguré à Bruxelles dans le parc du Cinquantenaire en 1899. Le monumental relief est sculpté l’année précédente suite à une commande du gouvernement. Pour abriter ce monument, on commande au jeune architecte Victor Horta la construction d’un pavillon néoclassique aux allures de temple grec. Large de 11 mètres et haut de 6 mètres, le relief de Jef Lambeaux a tout ce qu’il faut pour choquer la bien-pensance. On y voit notamment les plaisirs de l’humanité, la maternité, la débauche ou la séduction. Mais aussi ses tourments : le viol, le meurtre, le suicide ou la guerre. Les femmes nues sont âgées ou dodues, loin des canons de beauté. Les corps sont tourmentés, contorsionnés. Ultime affront, un Christ décharné est crucifié dans cette cohue, relégué dans un coin. C’est l’ange de la mort, presque sanctifié, qui occupe la place centrale. Lambeaux ne donne pas de nom à son œuvre, qui sera appelée de différentes manières avant son titre final : Les Passions humaines. Trois jours seulement après son inauguration, le pavillon est fermé au public et obstrué par une palissade.
Le 5 juin 1908, Jef Lambeaux s’éteint à l’âge de 56 ans à peine. Il souhaitait être inhumé sous le pavillon, sous son œuvre maitresse, mais cela lui sera refusé. La bâtiment ne sera d’ailleurs que rarement ouvert au public par la suite. Aujourd’hui encore, les œuvres de Lambeaux trônent dans les rues de Bruxelles, Anvers, Liège, dans le parc de Mariemont, dans les musées de Gand ou de Louvain. Jef Lambeaux, par son style et son impertinence, aura marqué l’art sculptural belge.
Joseph Marie Thomas, dit Jef, Lambeaux est un sculpteur belge né dans une famille ouvrière d'un père d'origine wallonne et d'une mère flamande le 14 janvier 1852 à Anvers. Il est le fils de Marie Louise Loneu et de Thomas Antoine Lambeaux, chaudronnier et batteur de cuivre. Il grandit dans une famille d'artistes talentueux. Son sens artistique est vite repéré, et le jeune homme a l’opportunité d’entrer à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers pour étudier la sculpture sous la direction du sculpteur Joseph Geefs et du peintre Nicaise De Keyser. En 1871, sa toute première œuvre, intitulée Guerre, est exposée à l’exposition annuelle de l’académie. S'ensuit une longue série de groupes humoristiques et pittoresques, tels que Enfants qui dansent, Le nombre porte-bonheur et Un accident (1875). A cette époque, son principal souci est de représenter le mouvement. En 1877, il obtient la commande pour le monument funéraire de Jacob Jordaens à Putte, et pour 4 figures allégoriques sur les consoles de la colonne monumentale du Paardenmarkt à Anvers.
Il décide de suivre son ami et peintre Yan Van Beers à Paris, où il s'aventure dans la peinture et travaille dans l'atelier de Gustave Vanaise. Il y mène une vie modeste. En 1881, il revient dans son pays natal avec une nouvelle technique, la méthode de la cire perdue, qu'il utilisera pendant plusieurs mois au Musée Continental de Bruxelles. Grâce à l'argent récolté, il a pu créer sa première œuvre qui fera sensation, Le Baiser. Il s'installe à Saint-Gilles, où le succès l'attend. Il sculpte des cariatides pour l'Hôtel de ville d'Anvers et il expose Le Baiser et Les Lutteurs au Salon de Bruxelles, pour lesquels il obtient une médaille d'or. Son atelier regorge de bustes, de statues, d'études et de statues en plâtre. Lors d'une visite en Italie, il est très impressionné par les sculptures de Giambologna. C'est de là que vient sa préférence pour les effets de force et de mouvement dans la figure humaine. En 1883, il devient l'un des membres fondateurs du Groupe des Vingt, un cercle d’artistes avant-gardistes qui compte quelques grands noms : James Ensor, Fernand Khnopff, Félicien Rops, Henry Van de Velde, Anna Boch, Auguste Rodin, etc. Jef Lambeaux démissionne après la première exposition du cercle en raison de son mécontentement face aux idées trop avant-gardistes du groupe. Les thèmes qu’il travaille sont plutôt issus du folklore, de l’histoire ou de la mythologie. C’est le cas, par exemple, de la fameuse Fontaine de Brabo, inaugurée en 1887 sur la Grand-Place d’Anvers. Elle est le symbole officiel d’Anvers car elle retrace la légende fondatrice de la ville. Le sujet de la composition fait référence à l'histoire du soldat romain Silvius Brabo et du géant Druon Antigoon. Selon la légende, ce dernier demandait un important péage à tous ceux qui voulaient remonter le cours de l'Escaut. Les récalcitrants voyaient leurs mains tranchées par le géant. Il rencontra un jour Brabo, qui aurait réussi à le tuer et, pour venger les victimes, coupa la main du géant et la jeta dans le fleuve. Le socle montre des sirènes, des phoques et d'autres créatures marines, représentés avec une fluidité qui anticipe déjà l'Art nouveau. Jef Lambeaux est alors fait chevalier de l'Ordre de Léopold. Les commandes vont alors s’enchaîner. Il expose dans les salons à Bruxelles, à Berlin et à Paris. Il enchaîne les récompenses. Ses bronzes de petites tailles décorent de nombreuses demeures bourgeoises. Pourtant, Lambeaux est loin de faire l’unanimité. Son Ivresse, présentée au Salon de Bruxelles en 1893, lui vaut de nombreuses critiques pour sa représentation sensuelle de la chair humaine. Mais l'année suivante, après une exposition à Paris, il reçoit une décoration de la Légion d'honneur. En 1896, il reçoit la médaille d'or lors de la Grande exposition d'art de Berlin. Le 9 décembre 1898, Jef Lambeaux épouse Juliette Marie Christine Wittocx à Vilvorde. Leur fils, Émile, nait le 16 octobre 1875
Durant l'Exposition Coloniale à Paris en 1900, Lambeaux reçoit le prix d'honneur pour son œuvre Le Triomphe de la femme. En 1903, il devient membre de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts. Il réalise également un grand nombre de portraits en buste, comme ceux d'Hendrik Conscience, d'Henri de Braekeleer et de Charles Buls, bourgmestre de Bruxelles. En matière de sculpture à la fin du 19e et au début du 20e siècle, il est impossible de ne pas comparer Jef Lambeaux avec la référence en la matière : Auguste Rodin. Les deux hommes se connaissent, et tous deux s’inspirent l’un de l’autre. L’expressivité des sujets et le travail des corps dénudés en mouvement sont autant de points communs de leurs œuvres respectives, signe d’une incontestable modernité. Un trait commun caractérise les deux hommes : le goût pour le sulfureux. Lambeaux semble s’amuser à choquer la morale de son époque. Franc-maçon notoire, il n’hésite pas à provoquer les esprits conservateurs. Lorsque la ville de Liège lui achète Le faune mordu pour l’installer dans le parc de la Boverie, la polémique éclate. L’œuvre, admirée par Rodin, représente une femme nue tentant de se défendre avec rage de l’agression sexuelle d’un faune en lui mordant l’oreille. Le sujet choque tellement que le vicaire de Liège fait renvoyer l’œuvre à son auteur. Avant même l’affaire du faune, une œuvre emblématique de Lambeaux attise les polémiques : Le pavillon des Passions humaines, inauguré à Bruxelles dans le parc du Cinquantenaire en 1899. Le monumental relief est sculpté l’année précédente suite à une commande du gouvernement. Pour abriter ce monument, on commande au jeune architecte Victor Horta la construction d’un pavillon néoclassique aux allures de temple grec. Large de 11 mètres et haut de 6 mètres, le relief de Jef Lambeaux a tout ce qu’il faut pour choquer la bien-pensance. On y voit notamment les plaisirs de l’humanité, la maternité, la débauche ou la séduction. Mais aussi ses tourments : le viol, le meurtre, le suicide ou la guerre. Les femmes nues sont âgées ou dodues, loin des canons de beauté. Les corps sont tourmentés, contorsionnés. Ultime affront, un Christ décharné est crucifié dans cette cohue, relégué dans un coin. C’est l’ange de la mort, presque sanctifié, qui occupe la place centrale. Lambeaux ne donne pas de nom à son œuvre, qui sera appelée de différentes manières avant son titre final : Les Passions humaines. Trois jours seulement après son inauguration, le pavillon est fermé au public et obstrué par une palissade.
Le 5 juin 1908, Jef Lambeaux s’éteint à l’âge de 56 ans à peine. Il souhaitait être inhumé sous le pavillon, sous son œuvre maitresse, mais cela lui sera refusé. La bâtiment ne sera d’ailleurs que rarement ouvert au public par la suite. Aujourd’hui encore, les œuvres de Lambeaux trônent dans les rues de Bruxelles, Anvers, Liège, dans le parc de Mariemont, dans les musées de Gand ou de Louvain. Jef Lambeaux, par son style et son impertinence, aura marqué l’art sculptural belge.
Références bibliographiques